Afin que nous ne vivions plus pour nous-mêmes

Dans notre marche vers Pentecôte, méditons aujourd’hui avec le Père Raniero Cantalamessa. L’action purificatrice de l’Esprit ne peut être remplacée par notre effort mais nous pouvons l’accompagner, pour passer d’une vie « pour soi-même » à la vie « pour le Seigneur ».

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Voici une version audio du texte que vous trouverez ci-dessous :

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Quel est notre rôle dans ce processus qui porte de l’amour de soi à l’amour de Dieu ? Il consiste à accompagner l’Esprit, à collaborer avec la grâce à travers notre liberté. Nous devons nous déraciner de nous-mêmes et nous enraciner en Dieu. De nombreux arbres ont une « racine pivotante », une racine principale qui descend perpendiculairement dans le sol, sous le tronc. Tant que l’on ne donne pas un coup de hache à cette racine-là, toutes les autres racines latérales peuvent être coupées sans que l’arbre ne bouge et personne ne peut l’abattre.

L’arbre de notre vie a aussi une racine pivotante : c’est notre amour-propre. Tant que rien de plus fort que lui ne vient le « surplanter », on ne passe pas du vieil homme à l’homme nouveau, de la vie selon la chair à la vie selon l’Esprit. C’est l’action de l’Esprit Saint en nous ; l’action purificatrice de l’Esprit ne peut être remplacée par notre effort mais nous pouvons l’accompagner.

Paul décrit ce programme comme un passage de la vie « pour soi-même » à la vie « pour le Seigneur ».

Et il est mort pour nous tous, afin que les vivants ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui est mort et ressuscité pour eux.

2 Co 5, 15

En effet, nul d’entre nous ne vit pour soi-même, comme nul ne meure pour soi-même ; si nous vivons, nous vivons pour le Seigneur, si nous mourrons nous mourrons pour le Seigneur. Donc, dans la vie comme dans la mort, nous appartenons au Seigneur.

Rm 14, 7-8

Il s’agit d’une sorte de révolution copernicienne : ce n’est plus le soleil –Dieu– qui tourne autour de la terre –le je– comme un satellite qui serait à son service mais le contraire. L’Esprit Saint nous est donné pour que nous ne vivions plus pour nous-mêmes mais pour le Seigneur. L’œuvre du Paraclet couronne toutes les autres. Dans l’une des nouvelles prières eucharistiques nous disons au moment de l’épiclèse : « afin que notre vie ne soit plus à nous-mêmes, mais à Lui qui est mort et ressuscité pour nous, il a envoyé d’auprès de toi, comme premier don fait aux croyants, l’Esprit qui poursuit son œuvre dans le monde et achève toute sanctification ».

Si l’on décide de ne plus vivre pour soi-même, c’est-à-dire pour sa propre gloire, son propre intérêt et son affirmation personnelle, la grâce de l’Esprit vient à notre rencontre de mille manières.

Elle nous aide à reconnaître toutes les occasions de vaincre l’amour-propre, dès qu’elles se présentent à nous ; elle nous donne un indescriptible élan ou une attirance pour le faire, une joie quand nous l’avons fait, de la tristesse et la déception quand nous avons refusé de faire ou que nous avons cherché une excuse pour ne pas le faire.

Elle nous aide aussi à ne pas réagir, à ne pas nous excuser dès que l’on reçoit un reproche, une critique ou une parole dure, qui sont les moyens les plus efficaces pour vaincre notre amour-propre. En effet, prétendre terrasser l’amour-propre tout seul, sans aucune intervention extérieure, serait comme prétendre enlever soi-même une tumeur. […]

Nous exprimons aussi notre collaboration par la prière, en disant par exemple à l’Esprit Saint, avec les paroles de la Séquence de Pentecôte : « assouplis ce qui est raide » ou avec une autre prière de la liturgie : « si nos volontés se rebellent, ramène-les vers toi ». La grâce agit par ces moyens simples et non pas à travers je ne sais quel mécanisme automatique ou par des circonstances extraordinaires.

Raniero Cantalamessa, Viens Esprit Créateur,
Méditations sur le Veni Creator, EdB, 2018

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Image : Maître Heinrich de Constance, Christ et Jean (1280-1290) – Musée Mayer Van der Bergh, Anvers

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